ArchEthno, des matériaux ethnographiques bruts aux données

Par
Florence WEBER (Enseignante-chercheuse/ ENS-PSL)
Jean-Robert DANTOU (Doctorant/ ENS-PSL)
Jose SASTRE (Recherche/ ENS-PSL)
Agnes TRICOCHE (Recherche/ CNRS)
Carlo Maria ZWÖLF (Recherche/ Université PSL)
, modifié le
23 avril 2022
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archtethno
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L’outil ArchEthno, en finalisation de développement, permet aux chercheurs de structurer leurs matériaux bruts pour les transformer en données répondant à une question scientifique, tout en décidant pour chaque donnée/métadonnée si elle sera en accès libre ou en accès restreint à des personnes autorisées.

ArchEthno a été conçu pour résoudre un débat virulent sur l'enquête ethnographique. Parce que l'ethnographie repose sur des rencontres personnelles et un engagement entre les observateurs et les personnes enquêtées, la confidentialité des données d'enquête, justifiée par la protection des personnes, alimente le soupçon sur la rigueur des méthodes qualitatives en sciences sociales. C’est la raison pour laquelle nous avons construit ce logiciel encore en cours d’évolution.

Nous appuyant sur une expérience menée avec Agnès Tricoche dans le cadre du Labex TransferS entre 2014 et 2017, nous avons construit en 2018, lors d’une collaboration avec Carlo-Maria Zwölf dans le cadre de l’IRIS de PSL Science des données-données de la science, un dictionnaire de structuration des données et des métadonnées, au principe du logiciel nommé ArchEthno2020. Ce logiciel, développé grâce à un financement obtenu de PSL 
Prématuration par le Centre Maurice Halbwachs (CNRS), permet aux chercheurs de structurer leurs matériaux bruts pour les transformer en données répondant à une question scientifique, tout en décidant pour chaque donnée/métadonnée si elle sera en accès libre ou en accès restreint à des personnes autorisées. L'outil se décline en deux parties : ArchEditor, déjà fonctionnel, permet l'autosaisie des matériaux ; ArchWeb, plateforme documentaire pour le web, permettra la consultation des données autosaisies dans le respect des règles de confidentialité définies par les producteurs des données.

Ce sont les difficultés éprouvées dans les enquêtes collectives en ethnographie, liées à la crainte de vol des données autant qu’à l’impératif de protection des données personnelles concernant l’enquêté ou l’enquêteur, qui ont conduit une équipe de chercheurs – les photographes Jean-Robert Dantou et Mathias Nouel, les ethnographes Jean-Marc Goudet, Paco Rapin et Olivia Vieujean, l’architecte-urbaniste et géographe Alix de la Gaignonnière, ainsi que Preciosa Dombele et Mélina Gautrand, chargées de la gestion des données – à mettre en place, au cours de l’Atelier La Souterraine, les différentes étapes permettant de sélectionner parmi les matériaux ceux qui seront partagés dans l’équipe de recherche et, à terme, avec des chercheurs intéressés par la revisite de l’enquête, et ceux qui seront publiés au moment de la restitution aux enquêtés, puis à destination d’un public scientifique et, éventuellement, d’un public non spécialisé. La masse des matériaux est organisée dans une architecture numérique construite autour d’une ou de plusieurs questions scientifiques.

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On peut déjà noter la place importante que jouera la photographie dans l’interface de visualisation, choisie à la fois pour ses qualités formelles et pour son pouvoir évocateur, et dotée de tous les éléments qui permettent de comprendre la relation de prise de vues, la relation d’enquête, ce que la photographie donne à voir et ce qu’elle laisse en hors champ.

L’Atelier La Souterraine, qui porte sur la traduction spatiale de l’augmentation des inégalités sociales dans la France contemporaine, a permis de découvrir un autre aspect de la visualisation des données : la carte. Les cartes occupent dans l’enquête une double fonction : elles sont un outil de réflexion sur le déroulement de l’enquête ethnographique, elles sont également un outil de contextualisation des espaces étudiés.

Au fil de la conception du logiciel, il nous a semblé qu’il pourrait susciter l’intérêt d’autres usagers. Il vise à donner au chercheur la maîtrise de son processus d’organisation de ses matériaux, laissant ainsi libre cours à son inventivité au fil de ses tâtonnements.

L'équipe

Directrices

  • Florence Weber, professeure des Universités à l’ENS, département de Sciences sociales, CMH
  • Agnès Tricoche, ingénieure d’études au CNRS, AOROC

Collaborateurs et collaboratrices

  • Jean-Robert Dantou, chercheur doctoral SACRe, moniteur au département Arts de l’ENS, conception des liens entre données photographiques et ethnographiques
  • Jean-Marc Goudet, chercheur doctoral CMH, sociologue et médecin de santé publique, conception des liens entre matériaux de terrain et données scientifiques
  • Jose Sastre, informaticien indépendant, aide à la conception du logiciel
  • Alix Sportich, chercheur doctoral, moniteur au département Géographie de l’ENS, architecte, urbaniste, conception des données cartographiques
  • Carlo Zwölf, ingénieur de recherches à l’Observatoire de Paris, LERMA, conception de l’architecture informatique basée sur des dictionnaires de concepts et du dictionnaire de structuration des données

Publications 

  • Florence Weber (2016), « La base de données ArchEthno : archiver la documentation ethnographique », L’Archicube 21, décembre, p. 140-148.
  • Florence Weber (2017), “Towards a digital architecture of reflexive ethnographic data”, Ethnography, September. DOI: 10.1177/1466138117724482
  • Pauline Blum & Florence Weber (2018), « L’apprentissage de la réflexivité par le journal de terrain : retour sur des moments décisifs pour la transmission », Colloque Ethnographies plurielles #8, Paris, 11-12 octobre, Le transmissible et l’intransmissible dans la pratique ethnographique.
  • Carlo Zwölf & Florence Weber (2019), « Construire le savoir en sciences de la société : les apports de l’outil ArchEthno », Journée d’études “Open data, quèsaco ?”Paris, 27 mai.
  • Florence Weber (2019), « L'ethnographie au coeur des luttes. Ce que cache la question des données sensibles en ethnographie et en histoire contemporaine », Journée d’études Quel avenir pour l’enquête de terrain ? Gestion des données et éthiques de recherche, 8 octobre.
  • Jean-Marc Goudet, Jose Sastre & Florence Weber (2020), « La transmission des matériaux d'enquête sous ArchEthno2020 », Photographie et sciences sociales du contemporain : La Souterraine, revue d'étape, ENS, Paris, 8 octobre
  • Communication d'ArchEthno2020 au groupe de travail d'Ethnographies numériques au sein de la Research Data Alliance.
  • Tutoriel : présentation du logiciel ArchEditor (auto-saisie), novembre 2020, consultable sur site web ArchEthno (url à venir)

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