Retrouvez l'article d'Aurèle Crasson, Jean-Louis Lebrave, Jérémy Pedrazzi et Laurent Alonso, "Le toucher Touch/to touch him. Étude forensique de données numériques de Jacques Derrida. L’archive numérique et les modalités de son appréhension pour la recherche", dans le nouveau numéro de Genesis, intitulé Machines à écrire.
Machines à écrire, Sous la direction de Rudolf Mahrer et Jean-Louis Lebrave.
Observer en généticien la manière dont les instruments d’écriture prolongent nos organes et « perturbent » nos facultés, voilà l’objet de ce numéro. Lorsqu’on aborde cette question, l’incidence des outils sur l’élaboration écrite, on fait rapidement un premier constat. Nombreux sont les scripteurs qui affirment avec insistance que, privés de leur instrument fétiche, ils sont empêchés d’écrire et de penser. « Si je ne sens pas la résistance du papier sous ma plume, c’est peu de dire que je ne puis pas écrire : je ne peux pas penser » disait François Mitterrand (c’est Claire Doquet qui nous le rapporte ici-même). Nietzsche tient des propos analogues souvent cités ; on en trouve d’autres encore dans la série Writers at work ou chez Rambures – ces recueils de témoignages qu’exploite agilement Giovanni Zuccarino.
Si la possibilité de penser dépend, pour certains écrivains, d’un instrument particulier, on se dit que chaque outillage doit avoir une forte spécificité, dans laquelle le scripteur se reconnaît, ou non. Pourtant, en lisant les textes anciens qui abordent les techniques d’écriture et la description qu’en proposent les spécialistes des époques concernées (ici même, Chloé Ragazzoli pour l’Égypte antique ou Filippo Ronconi pour la Grèce antique et l’Empire byzantin), on constate que par-delà l’exotisme du contexte culturel, les pratiques scripturales décrites nous restent familières.
Les manières d’écrire d’hier sont intelligibles aujourd’hui ; est-ce à dire que les instruments d’écriture et les techniques qu’ils induisent ont peu évolué ? Et comment comprendre alors que les scripteurs soient si attachés, dans leur capacité de penser même, à un instrument plutôt qu’à un autre ? La manière dont l’outil scriptural perturbe (empêche, contraint et stimule) notre activité scripturale est décidément mystérieuse.
Ce volume collectif espère apporter des éléments de réponse à ces contradictions apparentes : concilier l’idée, commune elle aussi, que nos pratiques d’écriture ont connu de profondes mutations au cours des siècles et le sentiment d’une relative stabilité des gestes scripturaux.... Lire la suite
Rendez-vous pour la présentation de ce numéro le 16 mai 2023, au Séminaire général de l'ITEM (ENS, 29 rue d'Ulm 75005 Paris. Salle U209. 16h00-18h00).
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